Retour au Carnet du jour...
J'ai toujours fait en sorte d'être
celui qui
me connaissait le mieux au monde. Ce genre de choses ne va pas de soi.
*
Une minuscule bille qui danse au
creux de ma
paume : les livres passés et à venir.
*
Nous repeignons le ciel à volonté,
de la
couleur qui nous chante, privilège des poètes.
*
Nous vivons deux fois notre vie,
nous vivons
notre vie comme très peu de couples l'ont vécue.
*
Enfile une veste taillée dans le
tissu du
ciel : étoffe d'étoiles.
*
J'ai passé un accord secret avec
le
dictionnaire, un accord secret avec la liste des mots.
*
J'aime le chemin de ma vie.
*
Pendant
que j'avance dans le soir, je vois devant moi, marchant à reculons, un
homme qui ne cesse de me regarder en souriant, resplendissant :
moi-même.
*
Comme
un moteur à réaction capable d'aspirer l'air ambiant pour le
transformer en fiction, inspiration, expiration, il y avait la réalité,
il y a à présent du langage, l'ultime convertisseur, la deuxième Bible.
*
Tu ne sais pas quel écrivain
immense je
pourrais être, tu n'es pas à l'intérieur de moi, tu ne vois pas ce que
je vois.
*
Elle est énorme, et d'un seul
bloc, et toute
sucrée, comme une fraise géante.
*
Parfois,
nous avons presque peur de nous retrouver à court de phrases, alors que
pourtant nous sommes censés posséder la science des phrases.
*
Elle se tient en haut de la
montagne et tous
les vents lui obéissent.
*
Les anges tombent du ciel pour
venir se
presser sur notre passage et chanter nos prénoms réunis.
*
La Nature est un coeur gonflé qui
sent la
volupté.
*
Le gazon soudainement tapissé de
pâquerettes
jusqu'à être changé en neige.
*
Un jour, elle me dit "Plus je te lis, plus je t'aime".
*
Dites-moi pourquoi la vie prend
soudain
cette forme-là et pas une autre.
*
Elle possède un corps capable de
guérir mon
corps
*
Des semences de gazon jetées sur
son corps,
voilà ce que je suis.
*
Vous savez quoi ? je suis le vent,
personne
ne m'emprisonne.
*
Je construis ma cabane au paradis.
*
Même le sol me craint.
*
Ce
livre de rêves qui ne fut jamais publié, à la fin
duquel le narrateur, emporté par ses mots, prenait feu.
*
Tous
les autres me traitent comme si j'étais une légende,
comme si j'allais mourir bientôt. Ils veulent me pousser hors du
monde des vivants. Sauf elle.
*
J'ai été désigné.
*
Comment mesurer l'amour ?
*
Je
dois apprendre à mieux peindre le paysage de mes pensées.
Actuellement ? le champ de ruines. Demain ?
l'amphithéâtre. Hier ? les verts pâturages.
*
Je suis mort, et on me prend par
la main, et
on m'amène au paradis.
*
Je reste debout, sans voix, sous
une pluie d'étoiles.
*
Ma vie est en train de commencer.
*
Une
femme me donne la clé du ciel, alors je l'introduis dans la
serrure et je pousse la porte, et je vois que les anges
s'apprêtent à chanter, et la nuit devient jour.
*
D'un seul regard je fais sortir
des phrases
du sol.
*
Je serai toujours là. Je me
tiendrai
toujours ici, âgé de quarante-et-un ans et quelques jours.
*
Je sais maintenant qu'on
m'accordera autant
de temps qu'il sera nécessaire.
*
Tout le monde voudrait être à ma
place, tous
les hommes de la terre voudraient être à ma place.
*
J'écrase mon coeur entre mes
paumes, je
relâche mon étreinte, il explose en feu d'artifices.
*
Quand quatre yeux regardent dans
la même
direction, l'horizon se soumet.
*
À
chaque seconde de ma vie j'enfonce mes pas, et le sol me répond
comme s'il était un sommier; toute la force que j'exerce contre
lui, il me la rend au centuple.
*
Toutes
ces femmes que j'ai manquées, négligées,
égarées, oubliées, plus nombreuses que les
étoiles du ciel.
*
La fille de Zeus elle-même est
descendue de
l'Olympe pour me guérir.
*
J'ai dans la poitrine un trou
béant où
gravitent des centaines de planètes.
*
Elle se déteste, moi je me crois
en faute :
nous avons tant de choses à nous apprendre.
*
Une femme avec un sourire de matin
ensoleillé.
*
J'ai tellement envie d'elle que
mes bras et
mes jambes tremblent et battent comme des ailes.
*
À mi-chemin de ma vie, elle est
arrivée pile
à l'heure, exacte au rendez-vous.
*
Certains bâtissent des maisons,
notre
travail à nous c'est de créer des montagnes.
*
Tu retournes le disque de ta vie
et à la
torture succède le rire éternel. Pile, face.
*
En dix secondes je suis nu et je
me jette
dans la mer avec elle, les paroles nous submergent, j'ai sa main dans
ma main.
*
Mon corps est une maison.
*
Nous courons si vite, elle et moi,
que le
reste de la foule semble s'être statufié.
*
Chaque matin, je me lève et la
manne est là
sur le sol, au pied du lit.
*
Je marche calmement dans l'été,
j'ai le
soleil dans mon dos.
*
Nous nous sommes
assis sur le trône du monde, nous nous le sommes partagé,
elle règne sur l'hémisphère sud, je règne
sur l'hémisphère nord, mes yeux tournés vers le
ciel, ses yeux tournés vers le sol. Nos oreilles se touchent.
*
Je ne dois jamais m'écarter du
chemin de ma
vie : je connais d'instinct son tracé.
*
L'obscurité me berce jusqu'à ce
que mes
paupières se ferment.
*
J'ai pris place dans un ascenseur
qui ne
s'arrête plus de monter.
*
Tout ça fait sourire les arbres.
*
On ne veut qu'une seule chose :
vivre dans
la bulle de l'amour, demeurer au fond de l'eau. Le reste n'a aucune
importance.
*
Un lieu qui ressemble en tous
points à
celui-ci, mais où tout le monde est mort sauf nous deux.
*
Si
j'avais des yeux derrière la tête, tout serait plus simple
: je verrai en permanence à la fois d'où je viens et
où je vais.
*
Actuellement,
je souffre parce que tout l'intérieur de mon corps tremble. Il
tremble parce qu'on est en train de me déplacer. Ensuite, on
ouvrira le cercueil et je serai libéré.
*
Le sablier ne dort jamais.
*
Le jour où je serai mort, j'aurai
tout le
loisir d'hésiter.
*
Je
fonce à toute allure, je ne sais pas où je vais, mais je
sais que quel que soit le lieu d'arrivée, ce sera bien.
*
La lumière attire la lumière.
*
Celui
ou celle qui sait avoir la capacité de voyager dans l'espace et
le temps, finit toujours par sauter le pas et par le faire.
*
Elle pense encore à moi, je pense
encore à
elle, pas évident de détourner les fleuves.
*
Comme un mutant capable de
réaliser la
fusion entre les caractères imprimés et les corps humains.
*
Je ne suis chez moi, je ne suis
avec mes
semblables, que lorsque je me trouve au milieu des mots.
*
Elle est le coeur de mon coeur, le
centre de
la cible.
*
Quelle oreille, de nos jours, sait
entendre
les auteurs différents ? Avoir
une oreille qui sait lire sur les lèvres.
*
La littérature est en train de me
donner ce
que les éditeurs n'ont pas voulu m'accorder.
*
Combien
ai-je rencontré de femmes écrivains jusqu'ici dans ma vie
? quatre. Combien m'ont plu immédiatement ? quatre.
*
Elle m'a poussé dans le vide et je
n'en
finis pas de tomber. La chute est un beau voyage.
*
Si je m'arrête de parler un
instant, je
meurs.
*
Les femmes se chargent de me faire
écrire
jour et nuit, le bonheur comme le malheur.
*
Je vais dévorer mon propre corps.
Je lui
avais proposé
de grignoter des morceaux de ma chair, mais elle a
préféré me les laisser.
*
Je fabrique un moteur qui
transforme la
haine en amour et la colère en poésie.
*
La
vie tiède, la vie du mensonge, cette voie qu'ils
préfèrent en lieu et place de la vie du trou, la vie de
la vérité. Ils détournent tous les yeux du miroir.
*
Les
écrivains ? plus nous échouons dans notre vie
privée, plus nous réussissons dans nos livres; l'inverse
n'est pas vrai.
*
Entre elle et moi, l'irréductible
solidarité
des génies conscients d'eux-mêmes.
*
Tout mon être s'illumine : tu as
changé mon
sang en vin.
*
J'ai en moi une partie de
toi-même, reprends
ce qui t'appartient.
*
Je ne suis plus que du petit bois
et tes
flammes me dévorent.
*
Obligé de me battre jusqu'à la fin
de mes
jours, jusqu'à mon dernier souffle.
*
Les moments où je me vois comme un
personnage extérieur : mon double me parle depuis l'autre rive.
*
Des milliers de lettres m'aident à
me
déplacer, se
glissent entre le sol et mes semelles, et me font glisser souplement
comme un tapis qui se déroule.
*
Je sais où je vais, personne ne
m'arrêtera,
j'ai mon propre agenda, mes propres objectifs.
*
Aucun homme n'a des oreilles aussi
grandes
que les miennes lorsqu'il s'agit d'écouter ce qu'elle dit.
*
Un jour de plus, mais pas n'importe quel
jour.
*
Le monde est un gâteau dans lequel
tu as le
droit de croquer.
*
Dieu s'est déplacé en personne.
*
Bienvenue sur la terre promise.
*
Les gens qui se détestent
eux-mêmes (parfois de grands artistes ou de grands
génies). Les aider comme on m'a aidé.
*
D'un seul trait à main levée, elle
a fait
naître cent visages.
*
Cette nuit, les étoiles se mettent
à briller
en couleur : roses, bleues, vertes, jaunes, violettes.
*
Je jongle avec trois vies.
*
Amis souterrains, chatouillez-moi
le dos et
le cou, les chevilles et les mollets, les coudes et la poitrine.
*
Mon corps flotte tout seul sans
effort, il
dérive au gré
des courants quelque part au milieu de l'Atlantique. Sous moi : l'eau;
sur moi : le ciel.
*
Si j'ai la certitude d'être
aimé par une femme, n'importe laquelle, alors je deviens
éternel. L'autre solution, c'est d'écrire des livres.
*
Je suis une surprise.
*
La vie, c'est un grand escalier
que je
grimpe quatre à quatre sans jamais m'arrêter, sans avoir
le droit de reprendre mon souffle. Les tempêtes se
déchaînent en série, pas une éclaircie, pas
de ciel bleu, pas de soleil, pas une fleur, pas un pré, rien.
*
Je négocie avec le ciel.
*
Actuellement, je fabrique de
nouveaux
mots qui rejoindront bientôt leurs frères et iront
conquérir tous les pays limitrophes. Mon livre recouvrira la
planète comme un gazon sucré.
*
Une femme descendra du ciel et me
remontera
avec elle.
*
Je ne dois pas me laisser
distraire par les
doux visages du
passé, je dois écouter ma main, celle qui écrit :
si elle écrit bien, c'est que je suis sur la bonne voie.
*
J'échange ma douleur contre
quelques mots du
dictionnaire qui ne me coûtent pas un centime.
*
Bienvenue en enfer.
*
Les branches des arbres
s'inclinent vers le
sol à son passage, par respect pour son courage.
*
Je veux tordre l'Univers pour
qu'elle puisse
enfin épouser la
forme du monde, qu'elle s'y coule sans effort, comme dans un moule. J'y
arriverai car j'ai d'immenses pouvoirs.
*
Mon coeur repose à l'intérieur de
son corps.
*
Je suis la personne que
j'attendais. Je suis
la meilleure chose qui me soit jamais arrivée.
*
Je deviendrai son oxygène.
*
Pourquoi les autres disent-ils que
je suis
lumineux ? Parce que j'ai
à l'intérieur du crâne une lampe que je ne parviens
pas à éteindre.
*
Je nage dans mes nuits avec
bonheur.
*
Le coeur des étoiles bat pour moi,
les
étoiles brillent pour moi.
*
Nous, les hommes et les femmes,
nous
sommes prêts à faire n'importe quoi ensemble pour obtenir
un gramme d'éternité.
*
Je tapisserai de velours
l'intérieur de son
corps.
*
Tous les dieux se sont ligués
contre elle.
Mais mes pouvoirs sont puissants. Et mon amour ne faiblit pas.
*
Le temps joue pour moi, il me
tricote une
armure de souvenirs.
*
Chaque nuit, je parcours dans mon
lit des
centaines de
kilomètres. C'est pour ça qu'en me réveillant au
matin je suis si fatigué.
*
Je me vois depuis le passé.
*
L'immense espace de manque, le
cratère
qu'elle creuse lorsqu'elle n'est pas là.
*
La vie m'a retourné comme un gant,
en
quelques heures seulement.
*
N'être que liberté.
*
J'ai couché avec presque toutes
les femmes
du monde, puis j'ai
décidé de ne plus jamais me réveiller.
*
Une bonne oreille peut entendre à
des
kilomètres et à des années de distance.
*
J'ai une bouche qui parle toute
seule, même
pendant mon sommeil.
*
Je ne suis pas prêt d'avoir dit
mon dernier
mot.
*
Archives du Carnet...
Ce
texte est une oeuvre de
fiction. Toute ressemblance
avec des personnages ou des faits
réels
serait donc le fruit du hasard.
Ce texte
est ©
Marc Pautrel
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